L'art contemporain chinois : portraits au féminin

Introduction

Vers la fin des années 1990, l’art contemporain chinois voit sa notoriété croître lors de l’expansion économique du pays. Cette croissance se traduit notamment par une flambée du prix des œuvres au cours des 10 dernières années (avec quelques couacs). Cela profite-t-il à tous ? Si des artistes comme Zeng Fanzhi, Zhang Xiaogang ou encore Yue Minjun trustent les premières places, il n’en va pas de même pour les femmes qui demeurent, à quelques exceptions près, marginalisées sur le marché international. Ce frein à l’émancipation artistique présente un facette antithétique : si la promotion constante des artistes chinoises est actée et vérifiable auprès d’académies (elles reçoivent un enseignement similaire aux hommes dès le début des années 1980) et de galeries d’art, la valeur de leurs travaux est rejetée en périphérie. De grandes maisons de vente aux enchères chinoises comme Poly Auctions préfèrent jouer la carte de la sécurité en présentant les œuvres masculines selon des « normes nationales ».

Cette inégalité n’existait pourtant pas au début du XXe siècle, pas plus qu’elle n’était acceptée à l’époque de Mao, ce dernier considérant que « Les femmes portent la moitié du ciel ». Le régime communiste plaçait paysans et ouvrières sur un pied d’égalité dans la constitution d’une société prolétarienne socialiste et progressiste, quitte à défaire ces dames de leur féminité (cf. partie 1). Mais cette égalité étatique ne se reflète guère sur le terrain social où la femme est principalement considérée comme le moteur reproducteur du pays.

La première artiste contemporaine connue est Li Shuang, membre fondatrice du groupe « Les Étoiles » avec lequel elle participe à la fameuse exposition clandestine sur les grilles du musée des Beaux-arts de Pékin en septembre 1979. S’ensuit une « route du désert » des artistes chinoises dans le paysage culturel des années 1980, sommées de remplir leurs fonctions d’épouse et de mère au foyer qui doivent prévaloir sur les autres activités. La notion d’un art féminin est définie selon des critères androcentriques cimentés au fil de l’histoire du pays et de la nature patriarcale de son noyau social. Le statut de la femme est passé de la dépendance familiale à la dépendance collective, évolution rémanente à l’idéologie égalitaire de la Révolution culturelle où la femme était « standardisée » sur des normes physiques et morales masculines. Il n’est donc pas étonnant de constater que les thèmes récurrents abordés dès les années 1990 par les peintres chinois sont liés à certaines traditions comme le foyer, la maternité et la beauté.

La fin des années 1990 voit l’arrivée d’artistes chinoises qui questionnent l’image sociale de la femme avec notamment Cui Xiuwen et sa vidéo « Ladies Room » en 2000 : cachée dans les toilettes d’un prestigieux hôtel pékinois, elle filme des prostituées qui se changent et se remaquillent entre deux clients, le tout dans un ballet de gestes et de paroles devenu banal. L’idée est d’intégrer le spectateur à un espace social public (toilettes) et privé (zone réservée aux femmes) dans une critique du commerce du sexe en Chine. En revanche, la génération individualiste post-1989 ne cherchera guère à s’étiqueter comme victime d’un système à grands renforts de théories féministes susceptibles de former une ghettoïsation de leur « combat ».

Comme dit plus haut, le nombre de femmes artistes augmente mais leur visibilité reste encore anecdotique. Sauf dans cet article.

CUI Xiuwen / 崔岫闻 (1970 -)

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L’artiste devant un tirage numérique limité d’Angel n°3 (290x137cm, 2006)

Née à Harbin (province d’Heilongjiang), Cui Xiuwen est une artiste qui suità la lettre le précepte du peintre et sculpteur français Georges Braque : « l’art est fait pour troubler ». Les œuvres de l’artiste chinoise explorent la sexualité de manière provocante tout en multipliant les supports d’expression (peinture, photographie, vidéo, etc.). Fille de simples ouvriers, elle doit son intérêt à l’art grâce à son frère et sa sœur. Autodidacte, elle apprend à peindre en reproduisant des œuvres observées quelques livres d’art avant de suivre des cours particuliers puis d’entrer à l’académie centrale des Beaux-arts de Pékin.

Ses premières peintures représentent des couples s’accouplant de manière explicite ou des scènes de mutilation évoquant l’art de Max Beckmann. Cette série a choqué la communauté artistique de Pékin qui y voyait une incitation à la débauche et à la violence auprès des jeunes filles. Au cours de ses études, elle se fit également remarquée avec ses peintures controversées d’hommes nus, leurs parties génitales volontairement mises en évidence. Si l’étude du nu féminin est tolérée dans les écoles d’art, il n’en va pas de même pour les modèles masculins, toujours recouverts d’un voile sur certaines parties du corps ou entièrement vêtus. Son travail contraste fortement avec l’approche morale du nu qu’ont les chinois. Ceux-ci refoulent depuis toujours l’idée que l’homme nu soit visible et accepté, selon les principes de la vertu dictés par Confucius (VIe s. av. J.-C.).

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Rose and Mentha, huile sur toile, 1997

Une fois son diplôme obtenu en 1996, Cui Xiuwen forme avec trois autres amies d’études (Li Hong, Feng Jyali et Yuan Yaomin que nous verrons plus bas) un collectif baptisé Les Sirènes et exposent leurs œuvres dans leurs propres appartements. A cette époque, une artiste chinoise a peu de considération dans les institutions culturelles. Le nom de leur groupe provient de ces fameuses créatures chimériques qui tentent de charmer Ulysse, attaché au mât de son navire et écoutilles grandes ouvertes, subissant volontairement et avec violence les chants ensorcelants des sirènes qui ne parviennent pas à stopper son périple. Cette histoire illustre le statut de la femme chinoise dans une société patriarcale : l’apparence d’un ange mais l’esprit d’un diable. En somme, la femme serait à la source de tous les maux de l’Humanité !

Après avoir démultiplié l’image de l’écolière (dont une reproduction de La Cène de Vinci avec autant de filles que d’apôtres), l’artiste-photographe choisit en 2006 de se représenter sous les traits d’une adolescente enceinte, projetant ainsi une nouvelle image discutable de la jeunesse chinoise face aux préceptes moraux de ses contemporains. Ces derniers considèrent qu’il ne faut pas gâcher sa jeunesse et son avenir à vouloir enfanter si tôt et risquer de ne plus être acceptée par sa famille et la société en général. Ces jeunes filles sont souvent représentées en train de détourner le regard du spectateur, posant une main sur leur ventre et ne montrant aucune joie à l’idée de bientôt enfanter. D’autres sont affalées sur une chaise, jambes écartées, jetant un regard implorant sur le sort que leur jette la société chinoise. L’autre allusion, plus cruelle, repose sur certaines conventions patriarcales d’un autre âge où les femmes se doivent d’accoucher en priorité de garçons pour perdurer la lignée familiale, en accord avec la politique de l’enfant unique, instaurée en 1979. De ce fait, les avortements de fœtus (ou de bébés) de sexe féminin étaient nombreux (13 millions par an) ainsi que les stérilisations, les abandons massifs de bébés féminins et les infanticides. Cette loi démographique, abandonnée depuis le 1er janvier 2016, a également entraîné une baisse du nombre de femmes en Chine (120 garçons pour 100  filles en 2005). Piégées par ces restrictions, l’artiste illustre parfaitement les problèmes sociaux rencontrés par ces femmes : « Une femme peut-elle avoir le choix d’avoir et élever seule un enfant en suivant son instinct maternelle et de la sorte ne pas ressentir le besoin d’être mariée ? »

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Angel n°1, tirage numérique, 150x120cm, 2006

L’autre élément notable dans le travail de l’artiste réside dans le format de ses photographies. Elles sont souvent de grandes dimensions et présentent des décors gigantesques qui contrastent avec la petite taille des personnages ainsi que leur apparente quiétude. Cette méthode est un emprunt direct à la grande tradition des paysages chinois monochromes, exécutés à l’encre de Chine, donnant ainsi une toile de fond imposante qui ne réduit toutefois par l’importance de la présence d’un ou plusieurs personnages.

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Angel n°12, tirage numérique, 110x40cm, 2006

Au travers de cette répétition de l’adolescente, Cui Xiuwen raconte une histoire générationnelle de jeunes filles ayant soufferts de problèmes sociaux et d’insécurité. Ses différentes manipulations artistiques l’ont amenée à engendrer non pas l’image d’une personne en particulier mais une icône universelle qui transcende les genres, les cultures et le temps. Afin d’achever cette perspective générale, l’artiste emploie diverses techniques qui imprègnent l’image d’un contexte plus large. Tout d’abord, chaque décor est réduit à son plus simple appareil et souvent baigné d’une lumière quasi-clinique qui renforce les habits et le teint clair des jeunes filles. Un lieu hors du temps et de l’espace, où le spectateur est invité à méditer sur l’expérience humaine au travers des moindres détails psychologiques et physiques des modèles.

Son travail lui vaut une notoriété croissante et permit à l’artiste de remporter de nombreuses récompenses dont le prix national de la femme de l’année en 2008 puis celui de l’artiste chinoise la plus influente en 2010. Elle vit et travaille à Feijiacun, en banlieue pékinoise.

JI Xiaofeng / 纪晓峰 (1974 -)

Ji Xiaofeng

Diplômée en peinture à l’Université de sa ville natale (Qingdao) en 1996, Ji Xiaofeng se tient à l’écart des courants en vogue sur la scène artistique chinoise et se constitue son propre univers, à la fois simpliste et apaisant.

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School 1, sérigraphie 12/68, 57x67cm, 2010

LIN Xin / 林欣 (1979 -)

Lin Xin

Originaire de Shangrao (province du Jiangxi), Lin Xin était une enfant effrayée par la crèche. Sa mère l’emmenait parfois sur son lieu de travail, une usine où elle œuvrait comme électricienne, tandis que son père était installateur d’appareils électriques. C’est dans cet environnement qu’elle s’amusa à décortiquer de petits appareils qui ne fonctionnaient plus : « Aujourd’hui, lorsqu’il y a un court-circuit à la maison, c’est moi qui me charge de réparer le système électrique ».

Lin Xin effectue toutes ses études en peinture à l’Institut des Beaux-arts du Hubei à Wuhan entre 2003 et 2006 avant de se tourner vers l’enseignement, plus spécifiquement l’animation, dans cette même école mais également à l’Université de Technologie du Hubei. En compagnie de son mari Zheng Da, qui lui aussi enseigne la même matière dans un établissement différent, ils collaborent et exposent leurs travaux.

Tout comme ses pairs nés à l’aube des années 1980, Lin Xin profite rapidement des apports de l’ère numérique : « L’idée de travailler sur l’univers virtuel est venue lorsque j’ai appris durant mes études à utiliser des logiciels de modélisation sur ordinateur comme la 3D et cela m’a tellement plu que j’ai décidé de poursuivre dans ce média une fois mon diplôme obtenu ». Ces équipements virtuels ont aussi bien manipulé la vie des gens qu’ils ne les ont rendus addictifs. Nos existences, nos modes de communication, nos émotions et nos divertissements sont inévitablement entremêlés dans un univers virtuel qui forme un second moyen de vivre autrement. Ses travaux sur ordinateur débutèrent fin 2005. Combiner ce média avec la peinture lui permet d’approfondir l’expressivité recherchée dans ses sujets : « Je souhaite aider les gens à se découvrir eux-mêmes en les engageant dans une pratique similaire à un jeu virtuel et offrir ainsi une nouvelle perspective de discuter sur des modes de comportements humains enfouis dans les tréfonds de notre mémoire ».

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Little Portrait 2, tirage numérique, 45x60cm, 2010

L’artiste dépeint l’existence d’une humanité au travers d’expériences spirituelles et virtuelles sous la forme de projets infographiques en trois dimensions : « La réalité virtuelle est comme une âme matérialisée. […] Je me suis beaucoup questionnée sur les rapports existant entre le réel et le virtuel, leur nature respective, leur degré de rapprochement vers une vérité et enfin ce qui les distinguent. Si virtuel et réel sont diamétralement opposés, ils ne peuvent être séparés l’un de l’autre ». L’une de ses principales influences se trouve dans les œuvres du réalisateur Mamoru Oshii (Avalon, Ghost in the Shell) avec son univers mélancolique et introspectif.

Les œuvres de Lin Xin dressent une sorte d’impasse dans notre quête éternelle vers la perfection. Le virtuel prend peu à peu le pas sur le réel, notamment via l’Internet, et réduit l’être humain à une substitution de l’évolution de nos sociétés postmodernes. Le réel se dissipe tandis que le virtuel triomphe. Chaque œuvre peinte ou numérique de l’artiste présente un ou plusieurs simulacres humanoïdes, dotés de courbes féminines. « Elle » est constituée de câbles électriques, de prises, de composants électroniques et de différents métaux. « Elle » présente une allure élégante et délicate, brillante et attirante, capable d’émettre des sentiments au travers de son regard et évoluant hors de tout repère spatio-temporel. Lin Xin éprouve une certaine affection pour les machines et les technologies numériques, un sentiment qui s’est forgé tout au long de sa jeunesse : jeux vidéo en ligne, constitution d’identités virtuelles et communication par divers interfaces (Internet, télévision, jeux vidéo). La culture virtuelle nous force à concevoir de nouveaux modes de pensée au moment où la simulation et le simulacre se popularisent de manière croissante, modifiant de la sorte nos comportements au quotidien. Au travers de cette imagerie, Lin Xin symbolise notre dépendance au monde virtuel et à son équipement qui nous permet d’y accéder : « Les gens deviennent de plus en plus indulgents à être dépendant de l’électronique. Le monde est comme une boule de neige qui devient de plus en plus grosse et roule de plus en plus vite, incluant l’homme dans une telle vitesse qui n’a pas d’autre choix que de passer sa vie à pourchasser quelque chose. Nous n’avons ni les moyens ni la possibilité de ralentir pour réfléchir et voir ce qu’il y a autour de nous ». Ce poncif cybernétique façonne une image parfaite, à la fois physique et spirituelle, un compagnon idéal, fruit d’une introspection générale.

A travers son œuvre, Lin Xin s’interroge sur les efforts à fournir pour conserver une réalité individuelle dans un collectif virtuel.

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Avant 2016, c’est un ou rien. Mais ça, c’était avant…

LIU Hong / 刘虹 (1956 -)

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Née dans la province du Shanxi, en 1956, Liu Hong obtient son master de l’école des Beaux-arts du Sichuan à l’âge de 30 ans. Elle y enseigne la peinture à l’huile depuis 2000.

Ses œuvres mettent en avant un des principaux outils de communication (et de séduction) d’une frange d’une population féminine et adulescente, plus concentrée par son apparence que par sa « carrière familiale ». Le choix d’une couleur acidulée pour les cheveux au milieu des ensembles gris peut être interprété comme le détachement intellectuel de la femme à la société patriarcale chinoise.

WEI Ping / 韦萍 (1971 -)

Wei Ping

Née à Shanghai, Wei Ping (aka Sunny) se spécialise dans la gravure. Elle obtient un premier diplôme à l’école des Beaux-arts du Hubei en 1999 puis une maîtrise en 2006 à l’université de Shanghai.

Wei Ping est essentiellement connue pour sa série Stop Thinking. L’ensemble des personnages (nus féminins, portraits d’enfants et de seniors, etc.) sont dessinés avec des lignes d’écriture constituées des mots stop et thinking associés à ceux qui dénomment chacune de ses œuvres (body, surprise, boy, I am a good girl!, etc.). Les mots employés sont généralement en rapport avec le sujet « écrit » et invitent le spectateur à cesser de réfléchir et se perdre dans les méandres des lignes pour mieux contempler et apprécier les courbes d’un nu féminin ou se perdre dans le regard d’un modèle.

L’ensemble de son œuvre n’est pas sans évoquer certains textes du poète et écrivain Guillaume Apollinaire qu’il agença sous forme de calligrammes (poèmes dont la disposition graphique forment un dessin).

XIONG LIJUN /熊莉鈞 (1975 -)

Xiong Lijun

Titulaire d’une maîtrise à l’école des Beaux-arts du Sichuan en 2002, Xiong Lijun vit et travaille à Chongqing, sa ville natale. Ses peintures vibrantes agencent avec enthousiasme des personnages heureux et confiants dans l’avenir de leur pays, accompagnés d’une gamme chromatique électrique. Cette croyance en un monde meilleur et un épanouissement social est un credo que l’artiste exprime constamment dans ses œuvres avec des adolescents et de jeunes adultes exprimant leur volonté de grandir, s’enrichir et s’affranchir d’une pensée collective.

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Flower, huile et acrylique sur toile, 120x160cm, 2009

YANG Na / 楊納 (1982 -)

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L’artiste travaillant en 2014 sur Evening Valley (360x150cm) dans son atelier à Pékin

Native de Chongqing, Yang Na est titulaire d’une maîtrise à l’école des Beaux-arts du Sichuan en 2010. Elle vit en couple avec l’artiste Mu Lei et travaille à Pékin.

Dans son œuvre, l’artiste conçoit son propre avatar intitulé Nana. Ce personnage représente une déformation de la réalité, sans lien direct avec le monde de l’animation et de la bande dessinée. Cette exagération se base sur un fait universel : que ce soit dans les arts ou la littérature, chaque élément ou chaque expression tend généralement vers une exagération. Artiste féministe engagée, elle a su tirer de son expérience d’ancienne mannequin un enseignement. Elle souligne dans ses toiles les contradictions d’une jeunesse en proie à l’aliénation et à la morbidité.

L’ensemble des filles représentées sont en quelque sorte abandonnées et forment un reflet flou d’une société chinoise vivant dans un matérialisme croissant. En dépit de leur beauté, les jeunes chinoises font preuve d’un fort narcissisme et s’apitoient continuellement sur leur propre sort. Dans les travaux de Yang Na, des éléments tels que les bijoux, le parfum et la mode forment des symboles du consumérisme qui créent une autosatisfaction doublée d’une intoxication à cette recherche de la beauté factice et de la vie facile. Le poisson, autre signe récurrent des œuvres de l’artiste, est à la fois un symbole de vie et de faiblesse pour souligner la vanité des figures peintes dans une atmosphère sucrée et poisseuse. Yang Na nous amène à nous interroger sur la frontière entre la réalité et l’illusion de cette jeunesse à la recherche d’une liberté individuelle mais troublée par Internet, le consumérisme et la mondialisation.

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Untitled, huile sur toile, 2006

« Selon moi, pour que l’art soit touchant, il doit provoquer un effet similaire à la façon de traiter un ami, ce qui signifie être sincère, intelligent et dévoué. […] Au vue que chacun a vécu des expériences différentes et obtenu une compréhension des choses sous des angles différents, les gens poseront un regard et des sentiments différents sur mes peintures. C’est très intéressant, un peu comme concevoir des tests psychologiques ».

YUAN Yaomin / 袁耀敏 (1961 -)

Yuan Yaomin

Née dans la province du Hebei, Yuan Yaomin est diplômée de l’académie centrale des Beaux-arts de Chine à Pékin où elle fait la connaissance de Cui Xiuwen. Ensembles, et avec deux autres femmes artistes, elles constituent le collectif Les Sirènes et exposent leurs premières œuvres dans leurs propres appartements. Elle vit actuellement à Pékin et enseigne la peinture à l’académie centrale pékinoise.

Son œuvre picturale représente principalement les soldats du mausolée de Shi Huangdi, premier empereur de la dynastie Qin (IIIe siècle av. J.-C.) qu’elle visita une première fois lorsqu’elle était étudiante : « Quand je m’aperçus qu’il n’y avait aucune guerrière dans cette immense armée, ça me poussa à réfléchir sur la longue histoire de l’inégalité entre les sexes en Chine. En 1996, je commença à peindre autour de ce thème ». Ces illustres sculptures sont revisitées par l’artiste qui les affuble d’habits sexy et d’un rouge à lèvres avant de les plonger dans un univers coquet et psychédélique au milieu de nénuphars, symbole de fécondité. Elle leur fait prendre alors des poses aguicheuses et côtoient sur plusieurs toiles deux grandes icônes qui ont su se jouer des hommes : l’actrice Marilyn Monroe et l’héroïne du jeu vidéo Tomb Raider, Lara Croft.

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Hot steel age – New Terracotta n°49, huile sur toile, 100x80cm, 1999

Ce travestissement d’œuvres issues du patrimoine chinois propose une relation esthétique absurde et pleine d’esprit entre féminité et virilité, renvoyant à l’identité sexuelle et sociale de la femme chinoise contemporaine qui s’attaque à certains stéréotypes masculins et se libère peu à peu du joug patriarcal : « Mon objectif est d’attirer l’attention du spectateur. Les gens verront dans mon travail un signe de défi à l’encontre d’un monde dominé par le pouvoir masculin. Les femmes artistes sont généralement plus sensibles, tandis que les hommes sont plutôt rationnels. […] Dès l’instant où les femmes obtiennent le droit de sortir et travailler, elles devraient alors être traitées en égal par les hommes ».

ZHANG Xiao Bai / 张小白 (1982 -)

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Zhang Xiao Bai est une illustratrice qui s’est forgée un univers inspiré des mangas et de la fantasy et travaille pour différents supports depuis l’âge de 18 ans (illustrations commerciales, graphismes pour des jeux vidéos, etc.). Son imaginaire subjugue par excellence le monde féminin pour nous livrer une imagerie subtile et unique. L’artiste est reconnue internationalement dans le monde du tatouage et de la pop culture.

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©2012-2016 XiaoBaiArt

Le 23 février 2011, elle reçoit à Tokyo, des mains du Ministre japonais des Affaires Étrangères, le Prix d’Or pour son manhua intitulé Si loin et si proche… lors du 4e Festival International du Manga. Ce prix, créé en 2007 sur l’impulsion du Ministère des Affaires étrangères japonais, récompense chaque année les auteurs étrangers qui contribuent à la diffusion du manga et, plus largement, de la pop culture japonaise.

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L’illustratrice s’explique sur son œuvre récompensée : « J’essaie, par une touche poétique, de décrire cette fugacité de l’existence à travers des histoires de famille, d’amitié et d’amour, où l’on trouve les inévitables regrets et amertumes. C’est une œuvre brute issue d’un de mes rêves nocturnes. C’est aussi mon premier manhua de longueur importante. Pour conclure et résumer : ma plus grande fierté : avoir pu publier mon premier manhua avant l’âge de 30 ans ». Cet ouvrage est disponible aux éditions Kana (collection « Made In« )

D’s©

Prochaine et dernière partie : les artistes chinois

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4 réflexions sur “L'art contemporain chinois : portraits au féminin

  1. Pingback: L’art contemporain chinois : une plastique made in toc ? – NOSTROBLOG

  2. Passionnant, encore une fois. Je connaissais quelques artistes d’assez loin, en ayant vu tourner leurs œuvres (notamment Lin Xin).
    Parmi les découvertes, j’ai eu une grosse fascination pour Liu Hong. Ce qu’elle fait est vraiment sublime. Dans une moindre mesure, j’ai eu un coup de foudre pour Wei Ping.

    J’ai lu Si loin et si proche et je n’ai pas aimé plus que ça. Je trouve le trait trop pop justement, peut-être trop « manga » aussi… Enfin ça remonte, mon serait probablement différent aujourd’hui.

  3. Merci une fois encore pour cet article! Je ne m’y connais pas (ou tellement peu) sur le sujet, donc c’est une découverte presque totale.

    J’avais, ceci dit, déjà posé mes yeux sur le travail de Yang Na, c’est typiquement le genre d’oeuvres qui me trouble (pourquoi, ça, va savoir).

    Il y a une sorte de décalage avec l’art contemporain occidental, on sent une vague pop beaucoup plus récente.

    Quant à la vidéo « Ladies room », ça m’a fait bizarrement penser au travail de Nan Goldin (dont je suis complètement fan).

    Merci encore, je rattrape doucement mon retard dans ce doux voyage au pays de l’art contemporain chinois. :)

    • Yang Na joue sur une sorte de fascination morbide, ceci expliquant cela… ? ;)

      Bien vu pour Nan Goldin, je n’avais pas fait le rapprochement !

      Merci pour ton retour !

      D’s©

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