Trouve la paix, Eric

Au programme aujourd’hui, The Crow, la BD américaine de James O’Barr. Elle raconte l’histoire de vengeance d’un homme, Eric, flingué et laissé pour mort pendant qu’on violait sa femme il y a un an. Devenu immortel, leurs bourreaux vont connaitre l’enfer.

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En vagabondant sur SensCritique, j’ai fais beaucoup de découvertes « hors-manga ». On ne va pas se mentir : à la base, la bande dessinée nippone, sans tout connaitre, c’est mon domaine de prédilection. Alors quand, il y a à peu près un an, j’ai souhaité m’ouvrir à tous les domaines de la fiction, principalement les autres BDs et le cinéma en général, j’étais perdu. Maintenant encore, dans une librairie BD, j’ai du mal à me repérer dans les rayons franco-belges et comics.

Bref, tout ça pour dire que parmi mes découvertes sur ce site, il y a The Crow, le comic-book original. Peu d’avis, mais moyenne élevée. Synopsis très alléchant (même si je connaissais de loin le film et le destin tragique de Brandon Lee, décédé par accident sur le tournage). D’un coup, je me dis « purée, ça, il faut que je le lise, et vite ». Cette attitude, je devrais d’ailleurs y faire attention, elle pourrait me conduire précipitamment vers des trucs que je n’aimerais pas du tout.

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Au sujet de la genèse de cette œuvre, il est à noté que son auteur a voulu coucher sur papier sa profonde dépression suite à la mort de sa compagne, dans  les années 70, décédée sur la route. Il existe un débat sur les fictions : doit-on considérer une histoire distinctement de son auteur ? Ou au contraire faut-il tout connaitre de ce dernier pour saisir ce qu’il a voulu dire ? Dans l’absolu, je ne peux trancher. Mais il est clair que pour saisir l’intérêt The Crow, il faut connaitre cet aspect de la vie de O’Barr. Les chroniqueurs et l’éditeur mettent cet élément très en avant d’ailleurs quand il s’agit d’en parler. Tenez, je suis en train de le faire !

C’est pour ça que je prends le risque de spoiler un peu en disant cela, mais ça me parait nécessaire pour décrire en substance ce comic-book.

On sait comment va finir l’histoire. On sait que The Crow va éliminer tous ses adversaires, vu qu’il est immortel. Mais ce que l’auteur cherche à nous montrer, c’est également ce que lui recherche à travers son double fictif : la paix. Il le dit lui-même dans la longue préface de l’édition « définitive » de Delcourt. Et c’est à ce moment qu’on comprend ce qu’est ce comic-book : une succession d’émotions en dessin. Des émotions noires, tristes, qui aboutissent – si tout va bien, a dû se dire l’auteur  pendant la réalisation de son œuvre – au repos de l’âme de ce personnage qui hurle de douleur.

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Clairement, ce récit claque à la figure, car tout ce que je viens de dire transparait directement à la lecture. On pénètre presque l’intimité d’O’Barr. Et c’est pour ça que The Crow est une belle expérience en matière de bande dessinée. L’auteur s’est incarné en Eric et doit éliminer la cause de sa souffrance : les ordures qui ont ruiné sa vie et qui lui ont pris son amour. Ils sont la représentation des démons qui tourmentent O’Barr, ni plus, ni moins.

En bref, The Crow est un effet de style puissant, pur produit de la tristesse d’un homme, et c’est en ça que le potentiel émotif est grand, à condition d’y être sensible.

Petit mot sur les dessins : ils sont pas mal travaillés, mais témoignent de l’inexpérience de l’auteur à ses débuts. Certaines actions ne sont pas très claires. Et ils sont assez typique du style « comics des années 1980 », ce dont je ne suis guère friand. Mais ce n’est pas vraiment cela qui va gâcher la beauté du scénario.

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