Paolo Massagli – Apôtre du beaurrible et du seximaginaire

J’ai trop parlé de manga dernièrement et j’en ai oublié une chose importante : l’essence même de ma passion c’est quand même la bande dessinée dans son sens large. Donc retour aux sources en proposant du contenu non estampillé NIHON BANZAI pour revenir sur notre vieux continent et plus précisément en Italie. Entre deux clichés sur les pizzas nous nous attarderons surtout sur un artiste que j’ai découvert il y a quelques mois en mettant les pieds dans un engrenage sans fin : celui de la conquête du monde. Non pardon, ça c’est l’autre… Ah oui : les éditeurs indépendants. En cherchant du Shintaro Kago publié hors France, Meloku vous en parle très bien par ici, j’ai fini par me prendre d’une folle passion par le beau livre dans son sens strictement littéral : DU. BEAU. LIVRE. Et donc c’est sans détour que les éditions indépendantes Hollow Press, situées en Italie, m’ont fait tomber sous le charme de leur travail de passionnés qui ne se refusent rien. Vraiment rien. Attention tirelipinpon : la suite est très illustrée et ne sera pas du goût de toutes les sensibilités. Vous voilà désormais avertis.

Paolo Massagli Toxic Psycho Killer

Toxic Psycho Killer, un bon aperçu de l’oeuvre de Paolo Massagli.

Paolo Massagli est un des auteurs phares de cet éditeur. Ce dernier publie également Shintaro Kago sur des projets uniques et exclusifs, comme le prochain TRACT (que vous trouverez ici, si vous traînez pas trop) et qui s’annonce déjà culte pour les aficionados. On trouve aussi Tetsunori Tawaraya sur qui je reviendrai peut-être plus tard. Dessinateur italien aguerri et illustrateur de talent, Paolo est reconnu par son univers très unique : un mélange de sexe, de trash et surtout des références littéraires en veux-tu en voilà. Il utilise la sensualité comme personne en la mêlant sans crainte au laid des cicatrices, des corps mutilés ou d’autres malformations surnaturelles voire démoniaques. En résulte un dessin en noir et blanc d’une propreté incroyable, au trait maîtrisé et à la mise en scène très travaillée avec des contre-plongées et autres effets théâtraux. Ses personnages sont au cœur de l’attention, on en oublie le scénario et l’on ne retient que le spectacle visuel, charnel et aussi repoussant qu’attirant qui s’offre à nous. Le maestro Massagli fait épouser la nudité de ses personnages (surtout féminins, avec quelques variantes d’individus au genre indéfini, possédant des attributs masculins et féminins à la fois) à des décors tantôt brumeux, parfois tentaculaires, surtout organiques. Imaginez Milo Manara dessinant de l’eroguro très fantaisiste. Non cette bosse n’est pas mon smartphone dans mon pantalon.

Oz - Dorothée un peu paumée après la tornade

Oz – Dorothée un peu paumée après la tornade

Ses travaux récents sont Hell, Oz et Toxic Psycho Killer. Ce sont ceux que j’ai lu et/ou que je possède, donc je ne m’attarderai que sur ceux-ci. Hell est publié dans U.D.W.F.G. de Hollow Press : Under Dark Weird Fantasy Grounds, un label qui au travers de mooks (magazine+book) semestriels publie des auteurs au ton unique. Et Paolo Massagli y signe les pages de Hell, un conte presque muet à l’imagerie biblique très prononcée : anges et démons, un univers très aérien, beaucoup de symboles religueux. Les pages se suivent et il est parfois difficile de faire les transitions tant le texte est absent de l’œuvre, mais le dessin lui parle au nom de l’auteur : un imaginaire débordant d’inventivité pour créer des personnages toujours dans le même ton : beaux voire sexy mais aussi partiellement moches à cause de mutilations, cicatrices et autres défauts très marqués.

Autre œuvre publiée par Hollow Press : Toxic Psycho Killer. Ici on se trouve dans un monde post-apocalyptique, ou apocalyptique tout court. L’auteur cette fois se fait plaisir avec des aliens et autres tentacules en références à la science-fiction d’époque, j’ai nommé : Métal Hurlant. Un récit plus fourni en texte et surtout une expérience visuelle entre le trip sous acide et la science-fiction militante, tentant de faire passer des messages sur l’humanité et son sort sur cette planète qui ne nous appartient pas tant que ça.

Dernier projet de l’auteur et non des moindres car plus ancien que les autres : O.Z. Il réécrit à sa façon le Magicien d’Oz, avec une Dorothée à moitié nue qui va rencontrer le lion, le bûcheron de métal et l’épouvantail et tenter de rentrer chez elle après que sa maison se soit envolée à cause d’une tornade. L’histoire est grosso modo respectée, mais l’univers est entièrement « revampé » par l’auteur qui prend un malin plaisir à y incorporer ses petites touches : du grotesque, du sexy morbide, des corps magnifiques et aux poses aussi sensuelles que repoussantes de par un myriade de détails. Bref, c’est la même chanson en plus fournie encore au niveau du texte, vu que le titre s’appuie sur une histoire existante. Mais le rendu est fou, les planches sont quasiment chacune une toile que l’on veut exposer dans son salon (à condition d’y inviter les bons amis). Les plongées et contre-plongées sont légion et Paolo Massagli offre un travail de découpage visuel grandiose rien n’est fait à moitié. Un vrai régal.

Je terminerai par une petite galerie de dessins (faut cliquer), bien que vous pourrez retrouver son travail chez Hollow Press, sur son blog, ou encore sur Facebook.

Mon cher Paolo, désolé pour cet article difficile à traduire.
Amore e pace, grazie per il vostro lavoro. 

2 réflexions sur “Paolo Massagli – Apôtre du beaurrible et du seximaginaire

  1. Vraiment sublime, je regrette un peu de ne pas avoir pris le bouquin à sa sortie. Je vais réparer l’erreur en le commandant avec le nouveau Kago, si j’ai les moyens.

  2. Pingback: Biblioth’Eck – Janvier ~ Juillet 2016 – eckdesu

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