Le Pavillon des Hommes : Du rire narquois de la fille tyrannique à celui sinistre de la femme détruite

Dire que Le Pavillon des Hommes est un immense manga ne serait même pas lui rendre honneur. La série de Fumi Yoshinaga est devenue une institution au Japon, adaptée en plusieurs films et drama populaires, mais aussi, plus récemment, en anime sur Netflix. Le manga a été publié en 79 chapitres dans le magazine Melody des éditions Hakusensha entre le numéro d’août 2004 (sorti le 28 juin 2004) et celui de février 2021 (sorti le 28 décembre 2020). Les épisodes sont compilés en l’espace de 19 tomes dont le tirage cumulé aux ventes numériques dépassait les 7 millions d’exemplaires en 20231. La série a remporté de nombreux prix dont le Prix Culturel Osamu Tezuka en 2009 et le Prix Shôgakukan l’année suivante. En France, le manga est publié aux éditions Kana depuis 2009. Il est traduit par Sylvain Samson pour les premiers volumes puis par Miyako Slocombe et lettré par Éric Montésinos.

Uchronie revisitant le shogunat Tokugawa (1603-1868) à l’aune d’une maladie fictive nommée la variole du Tengu qui décime la population masculine japonaise, Le Pavillon des Hommes est une série de science-fiction dans un contexte historique. Elle revisite l’Ôoku – qui donne son nom au titre japonais du manga -, harem de femmes situé dans le château d’Edo. Mais dans la série de Fumi Yoshinaga, les rôles s’inversent. Les héritiers de la famille Tokugawa étant des héritières, le harem est par conséquent composé d’hommes. L’autrice se joue habilement de l’histoire japonaise en changeant les genres.

Au-delà d’être une uchronie brillante, la série a fait sa légende grâce à ses personnages charismatiques aux destins tragiques. Parmi eux, on retrouve Iemitsu, première femme Shôgun. Présentée comme violente et capricieuse, notre regard sur elle change au détour d’une scène se déroulant à la fin du deuxième tome. Afin de mieux comprendre à la fois le personnage et la finesse de l’écriture de l’autrice, nous allons analyser ce passage en trois planches dans cet article, le flashback qui suit ainsi que ses conséquences sur le retour au présent.

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My Picture Diary de Maki Fujiwara : La vie de famille dans l’ombre de L’homme sans talent

Actrice, artiste et écrivaine Maki Fujiwara n’est malheureusement pas connue pour son travail. Mais avec la publication de l’un de ses livres en Occident, en l’occurrence My Picture Diary par la maison d’édition canadienne Drawn & Quarterly et traduit en anglais par Ryan Holmberg, cela pourrait bien commencer à changer. Chronique d’un journal intime illustré à la tournure tragiquement exceptionnelle au sein d’un foyer qui a révolutionné l’histoire du manga tout en vivant dans la maladie et la pauvreté.

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Citrouille, yokai, vampire et légende urbaine : 7 mangas pour Halloween

Halloween est l’occasion idéale pour se plonger corps et âme dans des mangas d’horreur ou fantastiques. Qu’ils soient gores, effrayants ou tout simplement envoutants, voici ma sélection de sept titres parfaits pour accompagner vos soirées d’effroi. Au programme des vengeances, des meurtres et des tragédies, mais surtout des œuvres variées d’aujourd’hui ou d’hier explorant autant le folklore japonais que des mythes occidentaux. Peut-être trouverez-vous la perle rare dans cet article. Une série que vous étiez destiné à lire sous peine de connaître un destin funeste… Un manga ou un sort ?

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Mizumaru Anzai : Regard sur sa propre enfance à travers le gekiga

Mizumaru Anzai est assurément un auteur élégant. Noboru Watanabe de son vrai nom, il a vécu de 1942 à 2014, l’occasion pour lui de s’essayer à différentes formes artistiques dont le manga, l’illustration ou encore le livre d’images. Une vie qu’il a également passée avec ses collections, comme les poteries aux motifs de saule bleu et les boules à neige. Une passion prise très au sérieux puisqu’il était le président de l’association japonaise des amateurs de boules à neige et qu’il a sorti un livre sur sa collection. Si vous vous demandez quel est le rapport avec son activité de mangaka, la réponse est simple : les boules à neige sont des objets représentant des paysages liés à la nostalgie de l’enfance. Autant de thèmes que l’on retrouve constamment dans les œuvres de Mizumaru Anzai.

L’auteur est publié en France pour la première fois à la fin de l’été 2023 conjointement par les éditions Cornélius et IMHO, qui sortent respectivement Période Bleue et Tokyo Élégie. Le premier est traduit par Olivier Malosse et le second par Patrick Honnoré. L’occasion pour nous de découvrir Mizumaru Anzai, magnifique artiste au regard tourné sur son enfance et son adolescence.

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Inuyasha : Doux comme un hanyô

Entre le 13 novembre 1996 et le 18 juin 2008, le manga Inuyasha de Rumiko Takahashi est publié dans les pages de la revue Weekly Shônen Sunday. S’étalant sur 56 tomes, la série devient la plus longue de l’autrice, jusque-là connue pour des titres tels que Ranma ½, Urusei Yatsura ou encore Maison Ikkoku. Le manga est réédité au format deluxe à partir de janvier 2013. Cette édition est composée de 30 tomes et contient notamment les pages couleurs et un épilogue. Ce dernier a été publié pour la première fois le 6 février 2013 dans le magazine Weekly Shônen Sunday. À l’occasion des souvenirs de la catastrophe de Fukushima, la revue a fait revenir des héros populaires dans ses pages, dont Inuyasha pour une histoire se déroulant quelques mois après la conclusion de la série.

Adapté en anime, en différents jeux vidéo, plusieurs fois au théâtre, Inuyasha est un manga extrêmement populaire comme en témoigne son tirage supérieur à 50 millions d’exemplaires au Japon, à date de 2020. Tout en étant également un succès critique par ailleurs. Effectivement, la saga a notamment remporté le Prix Shogakukan du meilleur shônen manga en 2001. Il n’est donc pas étonnant que la série soit revenue au devant de la scène avec une suite en anime intitulée Yashahime en 2020, suivie l’année d’après par une version en manga dessinée par Takashi Shiina. Il est loin d’être un inconnu, car il est notamment l’auteur de la série fleuve Zettai Karen Children.

En France, l’édition en 56 tomes d’Inuyasha est disponible aux éditions Kana depuis janvier 2002. Je vous propose de vous plonger dans l’univers de cette extraordinaire série imaginée et mise en scène par Rumiko Takahashi à travers un article revenant sur plusieurs points fondamentaux qui ont fait le succès du manga.

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L’art d’Akino Kondoh résumé en 4 thèmes

Née en 1980 dans la préfecture Chiba, Akino Kondoh est une mangaka pour le moins atypique. Diplômée des beaux-arts en 2003, elle débute le manga quelques années auparavant, en 1998. Pour autant, elle n’est pas connue seulement pour ses bandes dessinées, c’est une artiste touche-à-tout qui s’est illustrée dans des domaines tels que l’animation, la peinture ou encore la sculpture.  Elle a été récompensée par de nombreux prix et a multiplié les expositions (personnelles ou collectives) à travers le monde. Parmi elles, on en retiendra deux proches de chez nous : Hint à Bruxelles en 2007 et VIDEOFORMES 2008 à Clermont-Ferrand en 2008. En 2012, elle a été invitée à Lyon dans le cadre du festival Japan Touch. Elle vit et travaille à New-York depuis 2008.

En France, trois mangas d’Akino Kondoh sont publiés par Le lézard noir. Le premier, Eiko, est sorti en novembre 2006. Il est composé de sept nouvelles datant de 1998 à 2002. Les insectes en moi, le second, est disponible depuis octobre 2009. Il compte quant à lui neuf histoires toutes publiées entre 2000 et 2004. Pour finir, Chroniques new-yorkaises a été mis en vente en août 2016, après une prépublication dans le journal Libération. Il compte 70 chapitres diffusés de 2012 à 2015 sur internet, ainsi qu’une histoire inédite en deux parties, servant de prologue et d’épilogue. Toujours chez Le lézard noir, en 2011 sort la première anthologie du magazine Ax. On y trouve une illustration d’Akino Kondoh en guise de couverture. Deux nouvelles de l’auteure sont également présentes dans le recueil, mais celles-ci ne sont pas inédites puisqu’elles étaient déjà disponibles dans Les insectes en moi.

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Maintenant que vous savez tout d’Akino Kondoh, passons au cœur même de l’article et posons-nous la question suivante : quels sont les éléments qui définissent le travail de l’artiste ? Pour y répondre, j’ai relevé quatre thèmes qui apparaissent de manière récurrente dans ses œuvres.

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Débat autour du meilleur manga de 2016

Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’année 2016 a été riche en bons mangas. Néanmoins Bobo, Damien et Meloku, ont chacun eu un coup de cœur tout particulier pour une œuvre et en ont longuement parlé sur Nostroblog.

Avec pour objectif de débattre sur leurs titres fétiches, les trois compères se sont retrouvés dans une discussion engagée qu’on vous livre ici-même.

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Ces 13 mangas que j'attends en français

Si Eck, Enwyn et Bobo le font, pourquoi pas moi ? C’est dans cette optique que je me décide à présenter des mangas qui mériteraient d’être publiés en français.  Choisir, c’est renoncer. Sauf que moi je choisis de ne pas renoncer. Du coup je ne vais pas lister ici-même trois ou quatre séries comme mes collègues, mais bien treize. Ouais, parce que les tops 10 c’est pour les petits joueurs (puis ça porte bonheur treize, non ?). Bon, au final j’ai quand même dû renoncer à quelques titres, car j’en attends bien plus que treize… J’ai donc décidé de me fixer une règle pour concocter cette liste : présenter uniquement des mangas d’auteurs qui ont déjà été publiés en France.

Et si certains éditeurs me lisent, qu’ils ne fassent surtout pas les timides et qu’ils piochent allègrement dans cette liste. C’est cadeau.

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Le rôle des femmes dans Hunter x Hunter

Quand on parle de codes du manga, c’est en réalité à un genre bien précis qu’on fait allusion : le nekketsu. Cette catégorie, vous la connaissez tous car elle a connu un immense succès au Japon comme en occident avec Dragon Ball et elle a continué à nous servir des séries populaires telles que One Piece et Naruto. Mais aujourd’hui, c’est un tout autre manga qui nous intéresse.

Débutée en 1998 dans les pages de la revue Shonen Jump, Hunter x Hunter est une œuvre de Yoshihiro Togashi, un auteur alors reconnu à qui on doit l’immense succès qu’est Yuyu Hakusho ainsi qu’un titre plus expérimental nommé Level E. Hunter x Hunter débute comme le plus parfait des nekketsu, suivant à la lettre les codes instaurés par ses aînés. Et pourtant, plus on avance dans le manga et plus on se rend compte que l’auteur brise l’ossature de règles que l’on croyait établies. C’est pourquoi, à travers une série d’articles, nous allons nous pencher sur la méthode employée par Yoshihiro Togashi permettant cette déstructuration du nekketsu. De cette manière, on en apprendra plus sur le genre, le manga en question et même l’auteur. Dans cette chronique, c’est la question de la place de la femme qui sera abordée.

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